Instance d’écoute et de dialogue éthique – Bretagne

Depuis le début de la crise sanitaire et l’arrivée de la pandémie de Covid-19 au début de l’année 2020, de nombreuses «  tensions éthiques » sont apparues dans les établissements médico-sociaux, notamment dans les Ehpad. Une réelle souffrance s’installe parfois ; elle désoriente les résidents, leurs familles, les soignants, ainsi que les équipes d’encadrement en Ehpad.
Comment faire respecter le confinement à un résident désorienté qui ne peut se passer de déambulation ? Est-il juste d’interdire tout contact tactile, y compris pour les résidents atteints de troubles cognitifs, pour qui le toucher constitue un moyen privilégié d’entrer en relation? Peut-on réaliser un test de dépistage de la Covid-19 sans le consentement d’un résident, alors que l’établissement compte des cas positifs ? Une visite sans contact physique entre des proches et un résident polyhandicapé ne risque-t-elle pas de susciter davantage de souffrance que l’absence de visite ? Peut-on opérer un traitement différentiel entre les résidents vaccinés et ceux qui ne le sont pas ?
Qu’il s’agisse des modalités de visites, du maintien de lien social et familial, du respect de la liberté d’aller et venir mais aussi de l’équilibre du principe de précaution avec celui de la proportionnalité des restrictions aux libertés ou bien encore du maintien de la délibération démocratique en établissement, les tensions et les incertitudes auxquelles ont été confrontées durablement résidents, familles, soignants et directeurs ont pu être source de difficultés et d’incompréhensions dans la relation et le dialogue.

Dans ce contexte d’exception et d’abondance de normes juridiques, instituées dans l’urgence, sans véritable recul et bien souvent marquées par l’insuffisante prise en compte des enjeux éthiques de terrain, les directions d’Ehpad et les soignants ont parfois ressenti un sentiment d’isolement, les laissant seuls face aux problématiques liées aux décisions institutionnelles de gestion de crise, tandis que les familles éprouvaient de l’inquiétude et un sentiment d’abandon de leurs proches.

Les Espaces de Réflexion Ethique Régionaux ont été à de nombreuses reprises interpelés par la grande souffrance des aidants mais également celle des familles de personnes vulnérables, bien souvent atteintes de troubles cognitifs, et qui n’ont que rarement l’occasion d’être entendues et dont les souffrances restent mises sous silence.

C’est dans ce contexte, et avec le concours de l’Agence Régionale de Santé (ARS) de Bretagne, qu’est mise en place une instance d’écoute et de dialogue éthique, animée par l’Espace de Réflexion Ethique de de Bretagne (EREB), en collaboration avec l’Association France Alzheimer, qui a expérimenté ce dispositif en Nouvelle Aquitaine.

Cette instance, aujourd’hui rattachée aux cellules éthiques de soutien de la région Bretagne, peut être saisie par tous (patients, proches, professionnels) à chaque fois que surgissent des tensions risquant de malmener l’éthique du soin et les droits fondamentaux des personnes , ou que semble s’installer dans la durée des pratiques d’accompagnement se trouvant être à l’opposé des règles éthiques.

Afin de répondre à une réelle demande du terrain, il s’agit pour les écoutants de se centrer d’abord sur les souffrances et les interrogations de chacun (familles, directions et équipes soignantes), afin de donner une chance à tous de partager leur questionnement et si possible de permettre à nouveau la circulation de la « Parole », cela afin de renouer un dialogue et de retrouver le chemin d’un « penser ensemble ».

*Cette saisie est susceptible d’être utilisée dans le cadre de publications de l’EREB, en respectant l’anonymat total des personnes concernées.